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> Faits Divers > Tribunal
04/07/2022 21:55
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AUTUN : Il voulait utiliser un fusil à pompe contre le maire et foutre une baffe au député

Le commerçant, leader des anti pass sanitaire, adepte des réseaux sociaux, écope d'une peine de prison avec sursis.
Son compte perso sur Facebook est fermé ? Qu’à cela ne tienne, il en rouvre un sous un pseudo (pas original du tout, ils sont très nombreux à s’en servir) qui raconte un peu sa position à l’égard de ..., de quoi ? De quoi, davantage que « de qui », même si certains s’en prennent plein la tête au passage.

« Jean Kule » (son pseudo) est absent à l’audience correctionnelle à juge unique de ce lundi 4 juillet, maître Marceau le représente. Vincent Chauvet, maire d’Autun, et Rémy Rebeyrotte, député de la 3ème circonscription de Saône-et-Loire, entendent se constituer parties civiles. Maître Varlet les représente et demande pour chacun d’eux l’euro symbolique, pour des outrages et des menaces de mort.
« C’est un agitateur avant d’être un délinquant », plaidera Julien Marceau. Le prévenu est, ou fut, leader d’un groupe de personnes dites « anti pass ». C’était la guerre. La « guerre sanitaire » mais quand même. Sur Facebook il s’est déchaîné (loin d’être le seul, soit dit en passant), et les « noms d’oiseaux » par lesquels il dit son mépris, sa colère et sa révolte (qui viennent sans doute de loin mais trouvent de quoi être alimentées) se déversent. Il dépasse largement « les limites que la loi pénale fixe à la liberté d’expression » dira maître Varlet.

Une vie de travail sur les marchés


Ces limites, il les franchit aussi à l’extérieur puisqu’il se sert de sa place de marchand sur le marché d’Autun, pour vociférer, voire insulter. Il perturbe, il trouble la tranquillité. Cela lui valut une première interdiction du marché en 2015, une sanction de 3 mois. Or le marché, c’est son gagne-pain. Il y travaille depuis ses 23 ans, il en a 57 aujourd’hui. Il gagne petitement sa vie. Il a grandi à la CECA, à Torcy, y a appris à gueuler fort pour se défendre. Mais il ne sait pas s’apaiser, cet homme.


Exclusion définitive du marché d’Autun


Deuxième sanction administrative, en octobre 2021, pour trois mois, « mais début 2022, il recommence », explique Damien Varlet. Le 4 février, le prévenu tient des propos injurieux à l’égard du député et du maire, ces propos sont rapportés aux intéressés.
Le maire prend alors un arrêté qui dit l’exclusion définitive de l’agité, du marché d’Autun. Arrêté que le marchand n’a pas contesté, du moins par voie légale, car pour le reste il s’est laissé aller à des « à force de pousser les gens à bout… », « si je vais sur le marché vendredi avec un fusil à pompe, sauvez-vous tous », et autres propos armés. Le maire dépose plainte contre lui pour menaces de mort.


« J’ai 1000 euros de fleurs que je ne pourrai jamais vendre à Autun »


En septembre 2021, Rémy Rebeyrotte déposait plainte pour le flot d’insultes parfois haineuses, qui le visent sur le compte Facebook du prévenu. Il mentionne également des rayures sur son portail et des tracts menaçants qui constituent un harcèlement, mais « n’apporte aucun justificatif à l’appui », précise le président Madignier. En 2022 le député est de nouveau entendu, il a également déposé une plainte pour menaces de mort réitérées.
Le mis en cause est entendu, lui aussi, et ses dépositions ne manquent pas de sel, car, constate le président Madignier, « il reconnaît, il regrette, et il maintient ». C’est qu’il en a gros : « Ils utilisent les mêmes recettes que contre les gilets jaunes », « je suis à bout, je suis laminé », « j’ai 1000 euros de fleurs que je ne pourrai jamais vendre à Autun », « j’aboie mais je ne mords pas », « je regrette mes propos, prononcés sous le coup de la colère. Je ne suis pas violent. » Pas violent, pas violent... Il a tout de même promis « une baffe » au député, si toutefois « oui-oui » (surnom du député) venait à le faire sortir de ses gonds. Il lui en veut très fort d’avoir quitté le PS pour LREM, et du coup ne lui passe rien.


« Il faut qu’il cesse d’outrager et de menacer »


« Il regrette, mais il continue, reprend maître Varlet. Il faut qu’aujourd’hui il cesse d’outrager et de menacer. » Le vice-procureur est sobre : les outrages sur les réseaux sociaux sont publics mais les gens visés ne sont pas présents, « c’est donc une infraction qui relève de la loi sur la presse » ; les menaces de mort sont caractérisées, avec une allusion au fusil à pompe, le 9 février dernier. Charles Prost demande une peine de 6 mois de prison avec sursis.


« Être une personnalité publique »


« Votre instruction n’a pas inspiré de terreur, dit maître Marceau au président. A la lecture, on a tous un peu rigolé parce qu’il faut une intention délictuelle, or personne n’a jamais pensé qu’il se servirait d’un fusil. » Les outrages sur Facebook : « C’est désagréable, c’est vrai. Néanmoins on est davantage dans le pamphlet 2.0 que dans les outrages. C’est quelqu’un qui fait le show. Et, quand on est député, il faut aussi savoir s’exposer et recevoir des noms d’oiseaux, savoir encaisser, même quand c’est injuste. C’est ça, être une personnalité publique. Monsieur utilisait le marché comme une plateforme oratoire, il était virulent, et il assume : il n’aime ni le maire, ni le député. Ces trois-là ne partiront pas en vacances ensemble, mais monsieur est un agitateur avant d’être un délinquant. Ce sont des menaces sans intention délictuelle. »

Décision


Le tribunal relaxe le prévenu du chef d’outrages et le condamne pour les menaces de mort réitérées à la peine de 6 mois de prison entièrement assortis d’un sursis simple. Il devra donner 1 euro à chacune des parties civiles, ainsi que 350 euros à chacun pour ses frais de représentation en justice.
FSA